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dimanche 30 janvier 2011

Maison, douce maison


De toutes les administrations auxquelles Sherpapa et moi-même eûmes affaire durant l'année 2010, la palme de la réactivité revient au Collège des Médecins du Québec. C'est ainsi qu'en juin, à peine un mois après l'envoi de nos dossiers, le Collège nous demandait nos disponibilités pour effectuer un stage d'adaptation de trois mois.

Des congés d'été et une Fête du Travail plus tard, alors que je gisais sur mon lit de douleur rayonnais du bonheur d'avoir enfin un fils, Sherpapa reçut un courriel du Collège des Médecins l'informant qu'un terrain de stage acceptait de l'accueillir du 10 janvier au 10 avril 2011, à l'Unité de Médecine Familiale d'Alma. Mais comment envisager de séparer la toute nouvelle famille nombreuse juste après une si grande joie? C'est simple, on n'envisagea pas.

Lorsque le troupeau décida d'accomplir sa transhumance vers les plaines enneigées de la Belle Province, maints détails techniques bassement matériels surgirent, dont le plus aigu était de trouver un hébergement.

Que celui qui n'a jamais contracté une trichotillomanie aigüe lors de la recherche d'un logement passe son chemin. Je ne m'adresse qu'à ceux qui ont déjà vécu l'angoisse de trouver une maison dans l'urgence pour cause de congé pour vente, de rupture sentimentale, de nouveau bébé, de mutation professionnelle ou encore de création d'une entreprise de restauration en Allemagne. Nous étions donc dans ces affres-là (sauf bien sûr que je n'ai pas largué mon chum pour ouvrir une baraque à beignets de morue à Berlin), affres multipliées par le décalage horaire compliquant les appels aux propriétaires et la distance rendant impossible les visites aux biens. 

Avez-vous remarqué comme l'exigence de confort croît avec les années? J'ai passé quatorze étés de ma vie à dormir sous une tente de patrouille sur un matelas mousse d'à peine un cm d'épaisseur, à creuser des toilettes à la turque et à fabriquer une salle à manger rustique et biodégradable pour vingt personnes en deux jours. N'empêche, donnez-moi une hache, deux pelotes de ficelle et trois rondins et je vous construis une table et des bancs pas plus moches que ceux d'Ik.a, avec une bien meilleure empreinte carbone.

Évidemment, Alma, Québéc, Canada comme destination hivernale pour une famille nombreuse ne laisse pas place aux contingences. Désormais parasites privilégiés médecins, nous avons pris goût au confort de la vie moderne à l'occidentale, confort raisonnablement compatible avec notre grand âge et notre arthrose débutante.

On peut bien le dire, la vie nous a pourris gâtés : il nous faut désormais impérativement une laveuse (que celui qui se prend l'équivalent d'un pot de fromage blanc par jour sur sa chemise me jette la première pierre), une sécheuse (idem pour celui qui a déjà essayé de mettre du linge sur une corde dans le jardin par moins 26°C), une connexion internet (indispensable à mon semblant de vie sociale) et un minimum d'ustensiles de cuisine, sans même parler du chauffage et d'un abonnement de déneigement (saviez-vous d'ailleurs que l'incidence des infarctus augmentait très sensiblement en hiver au Canada?).

Les rares courtiers en immobilier que nous réussîmes à joindre sur le secteur du Lac-Saint-Jean nous firent rapidement comprendre l'inanité de nos recherches. Pour eux, il s'agissait de nous trouver un mouton à cinq pattes sans commission, autant dire.... Dans tes rêves!  

Nous en étions à envisager de passer l'hiver dans notre voiture (absolument pas recommandé par le Canadian Automobile Association soit dit en passant), ou dans une résidence touristique du Lac-Saint-Jean avec pour seul inconvénient de devoir changer d'appartement tous les mois pour cause de réservation antérieure, lorsque le salut nous apparut sous la forme d’une ancienne personnalité politique d’Alma. 

Ce gentil monsieur, qui allait faire honneur à la devise de la ville, Énergique, Rayonnante, Hospitalière, s’enrôla sous notre bannière, convoqua le ban et l’arrière ban de ses relations… et en deux jours nous trouva une maison jumelée trois chambres-séjour-cuisine-salle à dîner et salle familiale avec jardin meublée équipée chauffée internetée et déneigée. Au temps pour le mouton à cinq pattes.

Mais on peut bien l’avouer, avant de prendre fait et cause pour nous, il avait tâté nos sensibilités politiques via Skype.
Lui : J’aime bien la France, j’y suis allé une fois.
Nous : Ben nous on aime bien le Québec aussi.
Lui : Mais Montmorency c’est où, c’est loin de Colombey-les-Deux Eglises ?
Nous : Heu…
Lui : Parce que mon plus beau souvenir de la France c’est quand j’ai survolé en hélicoptère Colombey et que je suis allé me recueillir sur la tombe du Général.
Nous : C’est vrai que c’est le fun, l’hélicoptère...
Lui : Et sinon, vous l’avez connu le Général ?
Nous : C’est à dire que… Il était déjà un peu mort quand on est nés alors…mais c’était sûrement quelqu’un de bien !

C’est en visitant l’école de Fille Aînée que nous avons compris : les seules couleurs affichées sont le bleu et la fleur de lys. Alma est un bastion péquiste (de PQ, le Parti Québécois). Les Almatois que nous avons rencontrés par la suite nous ont aussi confié qu’ils ne se sentaient Canadiens, que parce qu’il le faut bien.

Personnellement ça me va tout à fait ; dire qu’un jour si tout va bien je prêterai serment de fidélité à la Couronne d’Angleterre...

Alors en attendant : vive le Québec libre !

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Et c'est tout! Enfin normalement...
Bisous!